Mauvaises langues

Langue de lutte
3 min readJun 22, 2024

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1.

j’écris avec des fragments de verre cassé-coupant

les petits fragments de vie et de mort

ceux qui font saigner et se sentir vivant

j’écris pour dénoncer

ceux qui vivent pour dépenser

alors que d’autres meurent pour des pensées

ceux qui se lèvent pour tuer

pendant que d’autres lèvent des fonds

ceux qui en détournent

et détournent surtout le regard

qui sont lâches

qui lâchent l’affaire

qui lâchent prise

alors que d’autres mettraient leurs doigts dans la prise

devant toutes ces horreurs

y en a qui se convainquent qu’ils ont raison

emprisonnés dans leur mode de pensée

ou plutôt de non-pensée

la mort de la pensée, c’est la mort des humaines

la poussière, la fumée, le sang

j’écris avec les mots qui partent des tripes

et qui font des loopings dans le ventre

je vomirais les mots qui me viennent

et qui ressemblent aux criminels de guerre

les incendies qu’ils créent finiront par les brûler

à commencer par leur âme

2.

les regards mènent une vie secrète

ils sont liés à la vue, un des cinq sens

on regarde avec nos yeux a priori

ou peut-être avec le coeur aussi

dans le regard est-ce que je vois vraiment ?

qui est-ce que je regarde et pourquoi ?

toi, tu regardes toujours par la fenêtre

tu te crois dans un film

ambiance vitre-goutte de pluie-début de nuit-voyage en train

lui, il ose pas regarder dans les yeux

parce qu’il a peur de s’y perdre

et ça le tétanise

elle, elle regarde les passantes, les gens dans le métro

elle a un crush toutes les semaines

ce qui est bien dans la vie des regards

c’est qu’ils peuvent durer une demi-seconde

comme plusieurs longues minutes

qu’ils peuvent marquer

laisser indifférentx

ou tout changer

ils peuvent troubler, gêner, chambouler

la cage des yeux s’ouvre

et laisse sortir l’animal regard

regard de braise

regard de désespoir

regard désir

regard déçu

regard vide

les regards font leur vie

parfois ils se rencontrent et ne se comprennent pas

parfois ils aiment, parfois ils oublient

“ah mais tu me reconnais pas?”

les regards peuvent être noirs

comme le vide, comme la mort

regard qui tue

à trop regarder dans les yeux

on oublie d’écouter

pupilles dilattées, regard shooté

“je crois que j’l’aime” — regard envouté

“nan, t’es juste bourré” — regard alcoolisé

les yeux iris bleu

ceux qui font chavirer

regard dans le blanc des yeux

plus très blanc, plutôt rouge — regard enfumé

je la regarde quand elle fume

et j’adrore ça

les habits du regard sont nombreux

regard joueur, regard curieux

regard ténébreux comme le brun de ses cheveux

les regards qu’on n’oublie pas

sont ceux que l’on espère

regard qui mouille

regard qui sèche

regard qui souille

regard qui lèche

les regards mènent leur vie secrète

à l’abris des regards malicieux

et toi, quand tu te regardes, qu’est-ce que tu vois ?

3.

à mes adelphes

celleux qui ne sont plus

celleux qui ont été

pour nous, nos droits, nos vies

à mes adelphes en manque d’argent, en manque d’amour

celleux qu’on ne regarde pas souvent

celleux qu’on n’écoute pas assez

qui ne comptent pas vraiment

celleux qui n’ont pas ma chance

qui se battent avec ce qu’il leur reste

celleux dans la galère

à toustes mes adelphes gouines trans pédé.es

textes de Noa Meràki

instagram : @noamerakis

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Les textes de ce blog ont été créés lors d’ateliers d’écriture, en non mixité queer et féministe. Plus d’informations sur : www.facebook.com/languedelutte

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