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L’envers des appareils

2 min readOct 22, 2025

un texte de Flaz

7h37.

Se réveiller ! Ça commence mal.

Une journée à vivre pour la seule raison que ça fait 25 185 jours qu’elle n’a rien fait et de rares fois rien réussi à faire que ça ne recommence pas.

Parvenir à se lever change son humeur.

Elle ne cherche pas à le faire bien.

Sentir tout son poids sur ses deux pieds.

C’est ça « le faire bien » : tout sur deux. Tout dans le résultat.

Il faut ça pour affronter ce qu’elle appelle les « appareils ».

Ça commence avec la clenche de la porte de la chambre où elle dort. Il faut pousser à fond, exagérément, pour que la porte cède.

Elle s’engage dans la cuisine, attentive : le robinet, le frigo, le bouchon de la bouteille de lait, le réservoir de la cafetière. Ça menace.

Autant de pièges dont les demi-défaillances vont rendre ses gestes moins fluides, hésitants ou débordants. Des trop qui annoncent un déraillement possible de l’humeur. Ça tangue.

Explosif ou minant. Engueulant les appareils ou abattue, larmes silencieuses. Elle souffre.

Battue dans les deux cas. Vaincue par les appareils.

Défaite par les objets.

C’est que derrière chaque défaillance elle voit le bureau d’étude chassant les coûts en temps contraint, la souffrance au travail qui conduit à mal faire, l’obsolescence programmée, la consommation vomitive et désinvolte de que l’ont sait compté.

Ça pèse sur ses pensées, sa poitrine, ses lombaires, jusque dans ses deux pieds.

Elle doute de la capacité de son corps à porter tout ça, toute une journée. Ça n’a pas duré. Elle doute d’elle.

Les LEDs du four qui ne pyrolyse plus depuis longtemps lui vrillent: 7:46.

Texte écrit par Flaz pendant l’atelier d’écriture “Dingueries”

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Langue de lutte
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Written by Langue de lutte

Les textes de ce blog ont été créés lors d’ateliers d’écriture, en non mixité queer et féministe. Plus d’informations sur : www.facebook.com/languedelutte

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