Girlfight AC
Atelier du 25/01 à la Mut’ :
1) J’ai été fille modèle : obéissance, soumission, conformité
mauvaise graine : insolence, rébellion, intégrité
mauvaise fille, issue d’une lignée de mauvaises mères
mauvaise pioche, mauvaise herbe, mauvaise réputation.
J’ai été adulée, encensée, en haut du tableau,
paria, gros tas, derrière les barreaux
J’ai eu mauvaise conscience, bonne éducation,
de bonnes notes, de bons points, de sales appréciations,
de l’embonpoint, quelques baffes et même des félicitations !
Quelle différence ?
2) Auto-portrait :
Cheveux courts, naturels, nuque rasée, ni mulet ni teinture blonde,
je viens d’un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître
Veines apparentes dans le cou, les bras, beaucoup de cicatrices, casse-cou
j’aime le risque et le sport !
Bronzée même en hiver, éprise de liberté, de grands espaces, de plein air
scarifications, traces de prison, d’injustice
17 points de suture, d’un féminicide évité de justesse
Tatouages de phénix, de bateau, de mammifères marins
parce que je reviens de loin.
Atelier du 22/02 à la Mut :
3) Si mon corps pouvait parler il dirait
le volcan qui m’habite,
les rochers sur lesquels je bute,
tant d’impuissance dans ce monde de brutes
Il dirait les vagues qui déferlent, me secouent puis m’apaisent
le feu qui me dévore, l’énergie qui bout encore et malgré tout
Si mon corps pouvait parler il dirait
comment la comédie sociale me paraît exacerbée
les illusions qui m’ont bercée, transpercée
comment je m’y sens étrangère, entravée,
comment ça me reste en travers
Si mon corps pouvait parler il dirait
ma gourmandise, la soif de connaissances,
mon combat pour lâcher prise, la faim de rencontres, l’appétit de vivre
Dans la mélodie de mes humeurs quelques notes de bonheur,
fugace, fulgurance, flamboyance
Si mon corps pouvait parler il dirait
à quel point les normes de genre l’ont bridé
comment l’activité physique le transforme,
comment le féminisme l’a libéré
sans oublier la sexualité débridée
Si mon corps pouvait parler il dirait
à quel point j’ai pu me délecter de la douleur, de sensations physiques inégalées,
s’accrocher à la vie comme si elle se dérobait, s’épuiser, puiser dans ses réserves,
se découvrir des ressources insoupçonnées.
Un corset devenu corps sain, corps-soeur revenu de loin
Si mon corps pouvait parler il dirait
les entorses les fractures les chutes les courbatures les accidents
comme pour me protéger d’un danger plus grand…
Scruté sous toutes les coutures
Je cherche un.e adversaire : un cancer une maladie rare
quand on s’est construite dans l’adversité on la convoque, on la cherche
coûte que coûte, jamais quittes
Mais mon corps parle :
grammaire pugilistique
esquiver, dominer, encaisser, envoyer
danse dans la violence
tord le cou aux préjugés, coriaces,
uppercut toute puissance
tu les percutes,
ça se répercute sur ta jouissance,
direct dans sa face, la défaite s’efface.
Textes écrits par Girlfight AC