Amourité
ça commence comme un conte de fées queer :
elles portaient le même prénom,
bossaient dans l’éducation,
habitaient la même ville du 93.
Quand je l’ai connue, j’ai pensé
« des comme elles, on n’en fait plus »
authentique, généreuse, pertinente, entière…
Elles avaient des parents communistes,
l’une plus que l’autre, non pratiquante,
l’une était de toutes les manifs, en famille,
ne ratait aucune fête de l’Huma,
l’autre voyait très peu sa famille
mais croyait s’en choisir une.
Très sportives, l’une ne pratiquait plus,
l’autre réussit à l’entraîner.
Elle avait peur, voulait rester au sac de frappe,
l’autre n’avait peur de rien
l’une avait plein d’amis, l’autre peu,
l’une avait perdu son père,
l’autre n’en avait jamais eu ou si peu.
Férues de rap et de littérature,
elles ont partagé la scène et la création
au sein du collectif S’lame de fond.
Fumer au coin du feu,
se raconter nos vies,
en réel ou au tèl,
manger des trucs gras,
boire plus que de raison,
noyer le chagrin de nos ruptures,
se dire qu’elles ne nous méritaient pas,
des fous rires à n’en plus finir
dormir à la belle, guetter les étoiles filantes
écouter du son,
bouger la tête et les lèvres à l’unisson
marcher, courir, nager, rouler, boxer, s’évader
ouvrir des brèches, trouver les failles,
jouer dans les vagues et cramer au soleil,
à nos vacances au bord de l’amer
Vider l’appartement de ma mère défunte,
la mine défaite mais debout,
grâce à ta présence indéfectible,
ton intelligence émotionnelle
se croire invincibles
par la force de notre amitié,
tenir bon face au vent du dénigrement qui se déchaîne,
perdre une partie de moi avec toi :
l’insouciance, l’art de la joie
Tu brilles au firmament des absent.e.s
Une chose est sûre : des comme elle on en fait plus.
Le coeur en mille morceaux
J’ai perdu mon amie pour un mot de trop,
je lui en écris mille
ça ne la fera pas revenir
mais elle sera dans vos cœurs
alors ma peine sera moins lourde
Souvenirs impérissables,
j’y pense pas trop souvent
pour ne pas déclencher une tristesse inépuisable
sans regret mais amère, amitié amochée
A mon double, Ami Amor, à la vie à la mort
texte de Girlfight